Jean Joseph Marie Carriès naît à Lyon le 15 février 1855 ; orphelin à 6 ans. En 1868,
il est placé apprenti modeleur estampeur chez P.Vermare (sculpteur), suit des cours aux
beaux-arts. Ensuite il quitte Lyon pour Paris. Là Carriès consacre tout son temps
à la sculpture. C’est un triomphe, doublé d’une réussite financière. Malgré le succès,
Jean Carriès va abandonner la sculpture pour se consacrer aux grés. Ce projet est né en
1878 lorsque, visitant la section Arts japonais de l’Exposition universelle, il découve l
grés de la cérémonie du thé. Les collections parisiennes constituées par des amateurs, tels
ses amis
Georges Hoentschel et
Paul Jeanneney, vont l’inciter à se lancer dans l’aventure.
En octobre 1888, Jean Carriès installe un atelier à La Bertille, non loin du Faubourg des
potiers à St Amand-en-Puisaye. Grâce aux installations et les compétences de Normand et Lion,
il progresse rapidement et en février 1889 il peut exposer ses premiers travaux dans son
atelier du boulevard Arago. Le succès entraîne une commande titanesque :
une porte constituée
de 600 briques de grés ornementées de faunes germaniques, destinée à s’ouvrir sur la salle
abritant le manuscrit de Parsifal, œuvre ultime de Wagner.
Puis il s’installa à Montriveau, sur la commune d'Arquian à quelques kilomètres de St Amand en Puisaye. Jean Carriès s’adjoint le
service de tourneurs, d’un chimiste, de mouleurs et n’a pas négligé les conseils des
techniciens ou de professionnels confirmés. Les innombrables pots sortis des fours
de St Amand et de Montriveau possèdent une veine japonisante incontestable mais se réfère
également à la poterie traditionnelle de Puisaye. Pourtant Carriès innove lorsqu’il
déforme et strie la panse de ses œuvres. Quant aux épaisses coulées dont il revêt les
poteries, aux superpositions d’émaux craquelés laissant apparaître la matière brute, elles
donnent à ses créations une originalité qui ne doit rien aux artistes asiatiques. Carriès
crée un bestiaire fantastique :
Grenouille à oreilles de lapin,
crapaud difforme, Grenouillard ;
auquel il ajoute de rares pots monstrueux dont la panse s’orne de figures grimaçantes.
Les éléments constituant la porte puisent dans ce répertoire faunique inspiré des légendes
germaniques. Passant du bronze au grés Carriès édite l’essentiel de ses sculptures :
bébés,
faunes endormis,
guerrier, mendiant russe, cuisinier, novice, évêque, …
À Paris le succès l’accompagne toujours ; le triomphe lors de l’exposition de ses œuvres
en grés émaillé au salon du Champ de Mars 1892 lui vaut tout à la fois les louanges de la
critique, la croix de la légion d’honneur et de nombreux achats d’amateurs et de musées.
Malgré cette réussite, le travail et le coût énormes occasionnés par la porte vont le conduire
à sa perte.
La porte démoniaque, consumant santé et argent, le précipite peu à peu dans
la détresse et la ruine. Le 25 mai victime d’une pleurésie compliquée d’un abcès au poumon,
il est transporté à Paris chez son ami
Georges Hoentschel chez qui il décède le 1er
juillet 1894.
Texte et photos extraits du catalogue du musée du grès ancien, à Premery : La Passion du grès L'école de Carriès de Patricia Monjaret et Marc Ducret, et de: Etudes et
documents n°4 - 2001 du Service du Patrimoine et des Musée de la Nièvre.