Avant de s'intéresser à la céramique, Jean-Marie Maure fut marchand de bois, de charbon et de matériaux de construction. Le siège social de son entreprise était basé à St Étienne, plus une succursale dans la Nièvre à Nevers. C'est au cours d'un de ses réapprovisionnements en bois qu'il découvre tout près de St Amand au hameau des Ligers une poterie traditionnelle à vendre. Il en fait l'acquisition en 1920 et entreprend de remettre en état les locaux et le four couché. Aidé des potiers du cru, il relance la production de grès utilitaire. En homme d'affaires avisé, il pressentit l'opportunité de ce lieu ; en effet, une ligne de chemin de fer passait juste devant les bâtiments avec un arrêt à proximité.
Suite à la dissolution de la Société des Grès Flammés et Céramiques en 1924, J M Maure parallèlement à sa production de grès traditionnel, décide de reprendre une activité en vogue à l'époque : Les grès flammés. À la suite, il modernise les installations et fait construire ces grands bâtiments qui existent toujours de nos jours et longent la route de St Vérain.
En 1921, il embauche Alfred Lebret (né en 1871), excellent technicien, il venait de Vierzon, cité porcelainière réputée ; auparavant, à St Amand, il dirigea un moment la production artistique à la Société des Grès Flammés en compagnie de Lucien Arnaud. J-M Maure s'en remet entièrement à son savoir-faire et lui confie la direction artistique et technique de l'entreprise des Ligers. La construction du nouveau four rond pourrait dater de cette époque.
Alfred Lebret met au point une collection commerciale de grès coulé, comportant de très nombreux modèles déclinés en plusieurs tailles qui connurent un franc succès : vases, tasses, pichets, théières, cafetières.
L'émaillage est toujours d'excellente qualité, le plus souvent mat, avec un émail de fond sombre et des coulées de teintes claires mélangées. Les fonds bruns et surtout bleus de cobalt sont particulièrement appréciés. On rencontre également souvent des tons gris-vert assez neutres permettant de mettre en valeur les coulées colorées. Encore une fois, Lebret se montre habile dans le choix des couleurs. À noter, certains modèles originaux tournés témoignent d'une grande complexité et maitrise comportant des superpositions et cristallisations.
Toutes les pièces étaient signées indifféremment Lebret, Maure ou Ligers ; une remarque : Ces signatures semblent être du même auteur !! Nous connaissons également deux tampons apposés sur le fond des pièces dont la localisation à St Vérain ne doit pas porter à confusion ; en effet, le hameau des Ligers est bien situé sur la commune de Bitry.
Rachetée en 1935 par Roland Devedjian, la fabrique continua à fonctionner au ralenti jusqu'à la guerre. Lebret, vieillissant, y travaillait encore avec Maurice Chiliard, céramiste né à Paris en 1908. Durant la guerre, on allait encore à la poterie des Ligers afin d'acheter quelques pièces en stock à Alfred Lebret.
Texte B. Nesly d'après "La grande aventure des GRES FLAMMES 1900-1950 en Puisaye et ailleurs" de Marcel Poulet. Toute représentation ou reproduction interdite sans autorisation de l’'auteur.