Dès son plus jeune âge, François sera immergé dans un monde où l'art est omniprésent. De par ses parents Roméo et Colette qui dès 1967 façonnent et et créent des pièces en faïence. Et puis à n'en pas douté son grand père jean Eve (1900-1968) peintre qui a du être aussi à l'origine de cette passion pour la noblesse du geste et de sa créativité.
En 1972, à la fin de sa scolarité au lycée Jacques Amiot d'Auxerre, François entre en apprentissage auprès de ses parents à St Martin des Champs (89). Formation entrecoupé de
stages chez des artisans d'art, notamment chez Jean Cacheleux où il apprendra les techniques du plâtre.
C'est à cette époque aussi qu'il côtoiera toute une génération de jeunes potiers venus s'initier à St Amand ou aux alentours ; Claude Varlan, Brigitte Pénicaud, Eric Astoul,
Gilles Duru. Tous à leur manière participeront à l'éveil artistique du jeune céramiste. Dans un premier temps, de 1975 à 1980, il fera ses preuves dans une ancienne ferme
nichée à La Bussière sur Moutiers (89). Puis, attiré par une certaine émulation, il gagnera St Amand dans ce vieux quartier où des générations de potiers ont oeuvrés ;
le faubourg des Poteries.
Marié à Yolaine, le couple se portera acquéreur de plusieurs bâtiments contigus afin d'agrandir leur espace de travail. Ils achèteront, quelques années plus tard, l'ancienne
poterie Jacques doté d'un des plus remarquable four couché du village. Ce lieu emblématique où travailla Paul Jeanneney sera aménagé afin d'accueillir l'Association pour la
Sauvegarde du Patrimoine Potier en Puisaye.
Très inspiré par la tradition potière amandinoise, François Eve orientera ses choix vers un travail
sur la matière brute. De son petit four couché, il défournera de belles jarres à la panse généreuse, légèrement engobées, elles accueilleront dépôts de cendre et passages de
flamme du plus bel effet.
Le travail de l'émail ne fut pas pour autant délaissé ; une gamme restreinte d'émaux fut utilisée ;entre autre un bleu de fer et des blancs pierreux magnésiens.
Toujours attiré par les gros volumes, il exécutera de somptueuses pièces émaillées. De ses deux petits fours à gaz il sortira d'imposants plats carrés, des boîtes à couvercle dont quelques unes cintrées leur concédant grâce et légèreté. Ne négligeant pas non plus une production de contenant de fonction plus utilitaire ; tels des bols, coupes, plats et saladiers.
François Eve prendra le statut d'artisan jusqu'en 1989. De par son parcours, François Eve restera un personnage incontournable de l'histoire potière régionale ; aussi bien sa passion pour son travail encré et empreint de tradition que
son engagement pour la sauvegarde du patrimoine, sa disponibilité envers ses confrères, et la transmission de son savoir auprès des plus jeunes font de lui un être hors du commun.
En 2005, François Eve accompagné de Linda Lid quittera St Amand pour la Norvège.
Quelques repères :
La terre
François Eve achète sa terre brute en vrac, la compose et la raffine lui même, lui rajoutant chamotte ou terre de Noron La Poterie selon l'usage qu'il souhaitera
lui donner par la suite. Un délayeur, un filtre presse et une boudineuse lui permettront une autonomie et une personnalisation de son travail. Une masse de 5 ou 6 tonnes sera
couramment préparée et ainsi stockée afin d'être disponible à tout moment.
La fabrication
Par tournage, estampage et travail à la plaque.
Les cuissons
Il utiliseras 3 fours :
- Un four à bois traditionnel amandinois de 15 m3 construit de ses mains. Utilisé une fois par an, il consomme environ 20 stères de bois par fournée ; essentiellement du
bouleau et du charme. Pas de salage. Les cuissons durent 4 jours et 3 nuits et font appel à des amis potiers tel que Jean Michel Doix de Coulanges, Marie Pierre Meheust de
Mézilles et quelques autres relations amicales.
- Deux fours à gaz (en fibre d'alumine/silice) de 800 litres et 300 litres au propane, sont utilisés pour biscuiter et pour les cuissons grès à 1300° des pièces émaillées.
La commercialisation
- Un peu sur place dans un local aménagé en magasin ; sur le même lieu, son épouse Yolaine proposait une production artisanale de tissage.
- Participation à des expositions de groupe telles que l'Association des Potiers Créateurs de Puisaye (APCP) au Chaîneau de Treigny.
- Quelques expositions personnelles aussi. 1988 Le présent à Montbéliard, 1989 Le Lavoir à Châtillon sous Bagneux, 1990 Galerie Lieber à Vézelay, 1991 Commanderie des Antonins à
Lyon, 1995 Maison de la Culture Aragon à Hagondange.
L'Association pour la Sauvegarde du Patrimoine Potier en Puisaye
François et Yolaine EVE en sont les instigateurs ; crée en 2001, après l'achat de l'ancienne poterie ayant
appartenu à Albert Jacques, cette association a pour but de faire de cet endroit, après remise en état, un lieu de passage destiné aux jeunes créateurs en cours d'apprentissage.
C'est également un carrefour de rencontre et d'échange entre céramistes et amateurs autour d'expositions et manifestations céramiques. A ce propos en octobre 2003,
le grand four couché fut remis en chauffe après plusieurs décennies d'abandon. De nombreux bénévoles et professionnels se sont retroussés les manches afin de tourner, enfourner et
cuire ce monstre de 100 m3. (Les cuiseurs qui exposeront l'été suivant > ). Durant ces différentes étapes, un film fut tourné Puisaye de terre et de feu, histoire d'une tradition potière, réalisé par Jacques Tréfouel, il immortalisera des instants uniques dont la mémoire locale avait
presque tout oubliée.
Son passage au CNIFOP
Malgré le succès que rencontrait sa production, François Eve dû trouver une autre source de revenus ; le CNIFOP situé non loin de son lieu de vie
recherchait à l'époque un formateur responsable atelier. Il assura durant plusieurs années la formation de stagiaires au sein des sessions consacrées à la recherche sur les émaux et des cuissons.
Photos extraites des catalogues d'expositions de l'Association de Potiers Créateurs de Puisaye
Texte Bernard Nesly - source :
Monographie d'Etablissements Céramiques - Marcel POULET - 1991
RCV n°138, "Grand Feu en Puisaye" - Nicole CRESTOU - 2004
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