Robert Deblander est né à Paris en 1924. Il fit ses études à l’école des Arts décoratifs de Paris et
commence dès 1946, un voyage initiatique à travers les centres traditionnels de la céramique, notamment
à Dieulefit, Vallauris ou encore à St-Amand-en-Puisaye où il fit plusieurs stages. De retour à Paris en 1949,
il crée son atelier à Neuilly-sur-Seine où il travaille la faïence classique. Ses décors aux oxydes sont
élaborés sur des thèmes non figuratifs. Il expose régulièrement aux Salons des métiers d’art, ce qui lui
permet de diffuser sa production à travers boutiques et grands magasins. Dans les années 50 Robert Deblander
est l’un des premiers à penser la céramique comme support de la peinture. En effet ses décors sont abstraits,
et ses émaux ne cèdent rien aux pigments des peintres. Mais Deblander ne se contente pas d’exercer sa maîtrise
de peintre, il modifie les formes obtenues au tour en les déséquilibrant, les aplatissant, les pinçant et les
découpant. De cette façon, il obtient des surfaces plus adaptées à ses décors, et une modernité non symétrique.
Son style abstrait atteint le plus souvent une perfection d’équilibre dans la composition. À partir de 1961,
intéressé davantage par l’invention de nouvelles formes, il se consacre pendant une vingtaine d’années au
grès, monochrome.
En 1958, Robert Deblander s’installa dans un hameau de St-Vérain, ainsi il voulut renouer avec ses premières amours,
le grès. Cela n’alla pas sans déboires. Il dut changer plusieurs fois d’atelier, et s’installa en 1962 aux Mottes,
à St-Amand-en-Puisaye, puis en 1980 au lieu-dit Les Ligers. Aux Mottes, il aménagea un four
de trois mètres cube, conservant le même type de cuisson traditionnel de St-Amand.
Jusqu’en 1968, il conserva son four à bois. Ce type de cuisson lui était commun avec les potiers de La Borne, à qui il
manifestait une réelle amitié. Mais ayant eu beaucoup de déboires avec ce four, il se vit contraint d’adopter
la cuisson au gaz. En 1963, il participe avec succès à l’exposition Les Grès contemporains au Musée national de
céramique de Sèvres puis, en 1965 au concours international de Faenza, à l’exposition de la céramique internationale
au musée Cantini à Marseille.
De 1965 à 1975 environ, Robert Deblander, parallèlement à sa production de grès « utilitaire », fit des vases-sculptures.
Il les travaillait au tour à pied, déformant, aplatissant ce qu’il avait réalisé sur le tour. Toutes ses pièces sont
dotées d’orifice et, structurellement, ce sont des vases même s'ils n’en ont pas l’apparence. Mais outre ses
sculptures, Deblander, a dû revenir au tournage pur, recouvert d'un émail monochrome. En raison du temps nécessaire
à leur création, les vases-sculpture ne pouvaient être en aucun cas rentables. Il lui fallut donc accomplir un travail
plus productif. La longue et superbe série de bouteilles est le reflet de cette production. Elles rejoignent des
formes de vases très verticaux.
Dans le même temps, il s’engage personnellement pour la défense de sa profession (il sera l’un des membres fondateurs
de la Maison des métiers d’art) auprès des institutions et écrit de nombreux articles critiques, notamment pour Les Nouvelles littéraires,
et pour la Revue de la céramique et du verre.
Dans les années 1980, Deblander réalisa des objets beaucoup plus volumineux, comme tel vase tourné à la manière de
deux coupes renversées l’une sur l‘autre. Les nuances sont innombrables, et maîtrisées. Les taches noires des pyrites,
parfois les traces de la pose de l’émail à la louche, parfois encore le résultat de la cuisson créent des effets
moins contrôlés.
Au début des années 1990, il devient indispensable pour Robert Deblander d’amorcer une évolution dans son œuvre.
La rétrospective de ses pièces en faïence décorée, organisée par le musée d’Art et d’Histoire de Villiers-St-Benoît
en 1994, lui fit redécouvrir son travail des années 50 qui éclaire singulièrement sa nouvelle production en
porcelaine. En effet c’est à cette époque qu’il redécouvre les joies du décor. Cependant les deux
conceptions sont néanmoins totalement différentes. Du temps des faïences, le décor était centré et jouait sur
le fond de la pièce, désormais le décor envahira toute la pièce et sera créé à partir de retrait d’émail.
Deblander a donc mis au point un décor, ménageant des motifs en réserve sous des papiers découpés, accompagnés de
sgraffiatti. Parallèlement à l’usage du grès, il a appliqué ce procédé à la porcelaine, et ainsi les réserves révèlent
la blancheur de la pâte qui contraste avec l’émail.
Artiste potier ayant utilisé toutes les matières céramiques, à temps et à contretemps des modes. Créant d’innombrables
formes, améliorant chacune jusqu’à la perfection. Il a révolutionné la céramique française de la seconde partie du XXème
Siècle, dont l’œuvre est l’expression la plus pure.
Texte E. Nesly extrait "Robert Deblander, L'oeuvre céramique 1951-2001",
et de « La céramique française des années 50 » de Staudenmeyer, éditions NORMA ; et du musée nationnal de Céramique de Sèvres.
Photo : "Robert Deblander, L'oeuvre céramique 1951-2001". Toute reproduction est interdite sans autorisation de l'auteur.
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